Thermo-politique terminale : gouvernements de droite, structure létale et logique du non-agir

Normalisation du chaos sous paradigme extractif

Le réchauffement climatique n’est pas affronté. Il est incorporé, structuré, gouverné comme rythme économique. L’État de droite, dans sa forme contemporaine, n’échoue pas. Il opère précisément. Il territorialise le dérèglement comme matrice de gestion différenciée. Il ne nie pas : il encode, intègre, convertit.

Ce qui est désigné comme “inaction” constitue une rationalité opérationnelle. Elle repose sur l’incorporation partielle du désastre à l’intérieur de dispositifs techno-administratifs d’absorption narrative. Le climat n’est plus contradiction. Il devient prétexte à reproduction accélérée. Le non-agir devient régime.

La gestion se performe en surface : crédits carbone, “neutralité”, “compensation”, indicateurs. Aucun de ces termes n’exprime le réel. Ils inscrivent l’irréversible dans un discours régulé. À ce régime d’énonciation répond une synchronisation perceptive, où la machine à spectacle lisse l’impact. Même des vecteurs ludiques comme le football en direct participent à cette pacification cognitive. Le flux compense la brûlure.

Gouvernementalité fossile et effacement du politique

Loin d’un retrait, l’État de droite se recompose comme méta-structure fonctionnelle au service de la continuité carbonée. Il n’exerce pas une violence visible. Il institue une normativité techno-gestionnaire. Celle-ci exclut le conflit, absorbe la critique, encode la résistance sous format inoffensif.

Ce qui se joue n’est pas dans la loi, mais dans la modulation : orientation budgétaire, sélection des données, priorisation des dispositifs, abstraction sémantique. La disparition est intégrée comme variable. Les inégalités deviennent coefficients.

Les corps deviennent segments logistiques. Ils sont distribués selon leur capacité à survivre dans l’environnement toxique projeté. Les marges sont externalisées. Les non-blancs, les précaires, les zones rurales deviennent périphéries sacrificielles. Le droit organise l’asymétrie. La logistique soutient l’ordre.

L’État n’échoue pas, il anticipe l’effondrement

Il ne faut plus analyser l’inaction comme absence. Il faut la penser comme fonctionnalité. L’État prépare l’après sans rupture, sans rupture visible, sans affrontement frontal. Il fabrique une continuité du désastre. Il rationalise la ruine.

Les rapports d’expertise ne visent plus à alerter. Ils servent à étayer la performance gestionnaire. Ils deviennent surface de légitimation, figures de neutralité, et objets d’appropriation stratégique. L’anticipation devient autorité.

L’écologie devient système de gouvernance prédictive. Elle ne vise pas la protection. Elle segmente, trie, cartographie, classe les populations selon leur compatibilité avec l’ordre industriel maintenu. Le vivant devient une dette. La réparation est financiarisée.

Vers une conflictualité matériologiquement dissidente de la destruction systémique

À l’intérieur du schéma gouvernemental fossilisé, toute invocation éthique opère comme modalité d’endiguement discursif. La mise en récit de la responsabilité devient transfert stratégique de charge onto-politique. La subjectivité dissidente est réabsorbée par les protocoles d’assignation morale, neutralisant tout geste destituant. L’éthique, ici, ne déploie pas. Elle refoule. Elle réoriente la puissance vers sa propre extinction.

La conflictualité ne saurait émerger dans les limites opératoires d’un champ régulé. Elle suppose une extériorisation tactique à la forme politique stabilisée. Il ne s’agit ni d’alerte, ni de contre-récit, mais de désactivation matérielle des opérateurs d’ordre. Ce qui doit être visé n’est pas la narration dominante, mais le substrat technique qui la soutient : trame énergétique, articulation contractuelle, schématisation algorithmique, réseaux matériels de transit et de stockage. L’insurrection n’est pas idéologique. Elle est structurellement corrosive.

Le sabotage, dans cette configuration, ne peut être réduit à une posture. Il devient praxis d’exposition brutale des dépendances critiques. Geste non-représentatif, il excède le spectaculaire pour atteindre le cœur du dispositif. Ce n’est pas un message, mais une fracture. Il ne communique pas. Il court-circuite. Il ne nie pas. Il rend dysfonctionnel.

Déprogrammation rythmique et désactivation grammaticale des régimes d’anticipation hégémonique

Dans cette configuration post-politique où la temporalité elle-même se voit privatisée, il ne reste plus que l’intervention brutale dans les logiques d’anticipation hégémonique, par désinsertion rythmique et altération des protocoles reproductifs. L’énonciation dissidente ne consiste pas à opposer un récit correctif, mais à perturber la grammaire même de la subsistance autorisée, à court-circuiter les circuits d’énonciabilité stabilisés par les structures de régulation épistémo-énergétique. Ce qui agit, alors, ne relève ni du projet ni du symbole, mais d’un forçage sans dialectique, où la désactivation remplace le dialogue, où le parasitage remplace l’alternative, et où la matérialité logistique cesse d’être infrastructure pour devenir théâtre de rupture absolue. Tout ce qui s’organise encore dans l’attente du basculement manque déjà la consistance de la sécession.

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