Dans les régions côtières du Bangladesh, l’avancée incessante de la mer n’est pas seulement un avertissement d’une potentielle crise future : c’est la réalité actuelle.
La nation, connue pour sa riche histoire et sa richesse culturelle, acquiert désormais une réputation plus sombre comme l’un des pays qui perd le plus rapidement des terres à cause de l’élévation du niveau de la mer.
Rivages submergés : la menace immédiate
Le phénomène n’est pas simplement une augmentation statistique des niveaux d’eau ; cela représente une menace tangible et immédiate pour des millions de personnes.
Abdul Aziz, un pêcheur de 75 ans, raconte comment il a dû déménager à un demi-kilomètre à l'intérieur des terres après qu'un cyclone a détruit sa maison en 2007.
Un an plus tard, la mer a envahi les terres où se trouvait autrefois sa maison. Aujourd'hui, il pêche au-dessus de ce qui était autrefois sa propriété, un cruel rappel de l'empiétement de l'océan.
Les scientifiques gouvernementaux ont confirmé que le niveau de la mer autour de la côte du Bangladesh augmente à un rythme parmi les plus rapides au monde en raison du changement climatique.
Cette augmentation rapide devrait obliger au moins un million de personnes à déménager d’ici une génération.
Abdul Hamid, directeur général du département de l'environnement, souligne que peu de pays ressentent aussi intensément les divers effets du changement climatique que le Bangladesh.
Une nation sous l’eau : les prévisions à long terme
La situation est exacerbée par la géographie du pays. Le Bangladesh est situé sur le delta des puissants fleuves himalayens du Gange et du Brahmapoutre, qui se jettent dans le golfe du Bengale.
Cette position unique contribue à l’élévation du niveau de la mer supérieure à la moyenne, provoquée par la fonte des calottes glaciaires et l’expansion des volumes d’eau à mesure que les océans se réchauffent.
AKM Saiful Islam, chercheur principal et membre de l'organisme d'évaluation du changement climatique du GIEC de l'ONU, prévient que d'ici 2050, le rythme actuel de l'élévation locale du niveau de la mer pourrait déplacer plus d'un million de personnes.
Son étude, basée sur les données satellitaires de la NASA et de son homologue chinois CNSA, montre une augmentation annuelle du niveau de la mer comprise entre 4,2 millimètres et 5,8 millimètres le long de la côte bangladaise, ce qui est nettement supérieur à la moyenne mondiale.
Cette augmentation progressive peut sembler minime, mais pour les quelque 20 millions de personnes vivant le long de la côte, l’impact est dévastateur.
La destruction se produit par vagues, à la fois littérales et métaphoriques, érodant non seulement la terre mais aussi le tissu même des communautés.
Quels sont les plans du gouvernement pour faire face à cette crise ?
Le gouvernement du Bangladesh a été proactif pour faire face à la crise provoquée par l'élévation du niveau de la mer.
Avec le soutien de partenaires internationaux comme la Banque mondiale, le gouvernement s'est lancé dans plusieurs projets ambitieux visant à améliorer la résilience des zones côtières. Voici quelques-unes des initiatives clés :
Renforcer les infrastructures
L'une des principales stratégies a été la phase 1 du projet d'amélioration des digues côtières (CEIP-1), qui se concentre sur la réhabilitation et l'amélioration de la protection des polders, des zones de terres basses récupérées sur la mer.
Ce projet vise à atténuer les effets des crues de marée et des ondes de tempête fréquentes, ainsi qu'à améliorer la production agricole en réduisant l'intrusion d'eau saline.
La réhabilitation de 10 polders dans six districts côtiers devrait assurer une protection directe à plus de 724 000 personnes vivant à l'intérieur des limites des polders.
Améliorer la préparation aux catastrophes
Outre l'amélioration des infrastructures, le projet d'abris polyvalents en cas de catastrophe (MDSP) a été mis en œuvre pour sauver des vies en fournissant des abris aux personnes menacées par les cyclones et les tempêtes.
Ces refuges servent également d'écoles sûres pour les enfants des communautés les plus vulnérables aux risques naturels.
Solutions basées sur la nature
Le gouvernement investit également dans des solutions fondées sur la nature, comme la création de forêts de mangroves le long de la ceinture côtière.
Les mangroves agissent comme des barrières naturelles contre les cyclones, l’affaissement et l’élévation du niveau de la mer, offrant ainsi un moyen durable de protéger le littoral.
Planification à long terme
Tourné vers l’avenir, le Bangladesh Delta Plan 2100 est un plan de développement global axé sur la croissance économique, la conservation de l’environnement et l’amélioration de la résilience climatique.
Ce plan présente l'action holistique et intersectorielle nécessaire pour améliorer la productivité et minimiser les risques de catastrophe.
Plan national d'adaptation
En outre, le Plan national d'adaptation du Bangladesh (2023-2050) a été élaboré pour guider les efforts du pays visant à devenir plus résilient aux impacts du changement climatique.
Ce plan comprend un programme solide sur les données et les analyses pour éclairer la prise de décision.
Ces efforts reflètent l'engagement du gouvernement non seulement à protéger ses citoyens et leurs moyens de subsistance, mais également à préserver l'intégrité environnementale du pays face aux défis du changement climatique.
Le sort du Bangladesh nous rappelle brutalement la nécessité urgente d’une action climatique mondiale. Il souligne la nécessité à la fois d’atténuation pour réduire les dommages environnementaux et de stratégies d’adaptation pour faire face aux changements déjà enclenchés.
Alors que la mer continue de s'emparer de plus en plus des terres du Bangladesh, le monde observe et apprend, dans l'espoir d'éviter un sort similaire dans d'autres régions vulnérables.
Les histoires d’individus comme Abdul Aziz ne sont pas que des anecdotes ; ils sont le visage humain d’un problème mondial qui exige une attention et une action immédiates.