En 1992 se tient une conférence de l’Organisation des Nations unies, à Rio de Janeiro, au Brésil. Elle est surnommée le « Sommet de la Terre » pour désigner son objectif : les délégations – on y compte plus de cent chefs d’État et de gouvernement – se réunissent pour protéger l’environnement et favoriser le développement des pays pauvres. C’est la troisième fois, depuis 1972, que l’ONU organise de telles conférences, prévues tous les dix ans. Celle de 1992 adopte trois conventions, la première sur la diversité biologique, la seconde sur la lutte contre la désertification et la troisième, la plus connue, la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.
La Convention s’appuie sur le rapport du GIEC rendu public en 1990 pour affirmer que les « parties » signataires, donc les gouvernements, se déclarent « conscientes que les changements du climat de la planète et leurs effets néfastes sont un sujet de préoccupation pour l’humanité tout entière ». La cause de ces changements est connue : « L’activité humaine a augmenté sensiblement les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère » et « cette augmentation renforce l’effet de serre naturel et il en résultera en moyenne un réchauffement climatique supplémentaire de la surface terrestre et de l’atmosphère, ce dont risquent de souffrir les écosystèmes naturels et l’humanité ». Les gouvernements signataires se déclarent résolus « à préserver le système climatique pour les générations présentes et futures ». « L’objectif ultime » de la Convention est de « stabiliser […] les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique ».
En 2019, 197 pays ont signé cette Convention, elle peut donc être considérée comme universelle. Elle met en avant le principe de précaution : il n’est pas nécessaire d’avoir résolu toutes les incertitudes scientifiques pour agir dès lors qu’un dommage grave et irréversible à l’environnement est constaté. Elle insiste sur la responsabilité commune mais différenciée des pays et des populations dans la cause du changement climatique : les populations pauvres émettent moins de gaz à effet de serre que les riches. Elle réaffirme « les besoins prioritaires légitimes des pays en développement, à savoir une croissance économique durable et l’éradication de la pauvreté ». Prioritaires… par rapport aux objectifs climatiques.
En apparence, la Convention Climat de l’ONU possède les éléments dont on pouvait espérer qu’ils se traduisent par des politiques vigoureuses, aptes à aboutir au but annoncé. Mais deux éléments majeurs en limitent l’efficacité. Tout d’abord, la Convention ne comporte aucune quantification du terme « dangereux » accolé au changement climatique qu’elle annonce vouloir éviter. Ipso facto, elle ne fixe aucun objectif d’émissions de gaz à effet de serre ni de calendrier à respecter. Ensuite, elle entend respecter la souveraineté des nations qui demeurent totalement libres de déterminer et d’appliquer les politiques climatiques nationales de leur choix. Elle ne comporte aucune contrainte, sauf celle de déclarer ses émissions de gaz à effet de serre à l’ONU.
La Convention cadre de l’ONU sur les changements climatiques demeure un texte fondateur et fondamental. Toutefois, l’évolution des émissions de gaz à effet de serre, qui ont augmenté de près de 50 % depuis 1992 au plan mondial, montre bien qu’elle ne peut suffire à résoudre le problème posé par le seul respect du texte d’origine.
La Convention est heureusement un processus évolutif. Les gouvernements signataires se retrouvent régulièrement, tous les ans depuis 2007, lors de COP destinées à examiner sa mise en œuvre et à prendre des décisions nouvelles afin d’atteindre ses objectifs. Ainsi, en 1997, la signature du Protocole de Kyoto engageait les pays industrialisés à des réductions de leurs émissions d’environ 5 % du total des gaz à effet de serre en 2012 relativement à 1990. Mais le Congrès des États-Unis n’a jamais ratifié ce Protocole. Quant à l’Union européenne, le seul groupe d’États à avoir en apparence respecté ses engagements (-15 %), elle a en réalité déplacé une part similaire de ses émissions vers des pays comme la Chine en y délocalisant la fabrication d’objets qu’elle consomme. La COP 15, à Copenhague en 2009, devait écrire la suite du Protocole de Kyoto , mais elle ne produisit qu’un texte très vague. Il comportait pourtant une avancée considérable, en quantifiant pour la première fois dans un texte signé des États le mot « dangereux » de la Convention, avec l’objectif de ne pas dépasser 2 °C d’augmentation de la température moyenne de la planète relativement au niveau pré-révolution industrielle. De cet objectif découle ipso facto une quantité totale maximale d’émissions de gaz à effet de serre à ne pas dépasser, le « budget carbone » dont l’humanité estime disposer.