Voies de chemins de fer qui ne tiennent plus droit, fissures dans les bâtiments qui menacent de s’écrouler, oléoducs qui s’affaissent subitement… ces dégâts du changement climatique sont déjà perceptibles dans toutes les zones du pergélisol. Le pergélisol est la partie du sol de Sibérie, du Canada et de l’Alaska, qui est perpétuellement gelée, parfois jusqu’à plusieurs mètres de profondeur. Son étendue est importante, il représente le quart des terres émergées de l’hémisphère Nord et plus de 60 % de la Russie. Sous l’effet de l’élévation des températures, il commence à fondre, ce qui provoque des dégâts sur les infrastructures et bâtiments construits sur un sol gelé, avec de faibles fondations. Pour parer à cette menace, il faudrait solidifier tous ces bâtiments en les ancrant à l’aide de fondations beaucoup plus solides et profondes… s’il est encore temps et si c’est techniquement possible.
La fonte du pergélisol libérera et réveillera des bactéries et virus congelés parfois depuis des milliers d’années, ce qui pourrait bien provoquer l’apparition de pathologies nouvelles. Déjà, un enfant est mort de la maladie du charbon (anthrax) durant l’été 2016 en Sibérie. La bactérie provenait probablement d’un cadavre de renne qui avait été congelé dans le pergélisol en 1941, lors de la dernière épidémie connue. Mais la menace peut provenir de temps beaucoup plus anciens, comme l’a montré une équipe franco-russe qui a réussi à réactiver un virus congelé depuis… 42 000 ans !
Quant aux glaciers de montagne, ils sont en régression rapide presque partout. En Europe, tous ceux situés en dessous de 3 000 mètres devraient disparaître d’ici 2100. Les Andes, l’Himalaya et la plupart des massifs montagneux verront, eux aussi, leurs glaciers diminuer de surface et de volume. Les conséquences locales seront importantes. Cela déstabilisera des terrains, provoquera des chutes de pierres, des coulées de boues. Partout où ces glaciers contribuent à une vie économique, comme dans les stations de ski d’Europe ou d’Amérique du Nord, cet apport disparaîtra d’autant plus vite que l’étendue et la durée de la couverture neigeuse diminuera elle aussi. Même si on respecte l’objectif climatique des 2 °C, les deux tiers des glaciers des Alpes auront disparu d’ici 2100.
Mais cette fonte modifiera également les débits des cours d’eau que les glaciers alimentent. Dans un premier temps, cela se traduira par une augmentation des débits de printemps et d’été. Puis, une fois que les glaciers auront perdu beaucoup de volume, voire auront disparu, les débits de printemps et d’été diminueront d’autant plus que les chutes de neige se seront également transformées en pluies durant l’hiver aux altitudes situées sous l’isotherme zéro. Les effets de cette transformation seront nombreux. Les sols, libérés des glaces, se réchaufferont et, à grande échelle, cela pourrait influer sur la circulation atmosphérique, en particulier sur la mousson asiatique. Localement, la disponibilité des ressources en eau pour l’agriculture se modifiera, elle sera plus abondante dans la première partie du siècle, plus rare ensuite. Ce phénomène concerne notamment les agriculteurs des Andes et du Tibet.