Au regard des émissions mondiales (près de 40 milliards de tonnes de gaz à effet de serre), celles de la France peuvent sembler modestes, mais cela provient surtout du fait que la population française ne représente que moins de 1 % de la population mondiale. C’est sur nos émissions, toutefois, que portent notre responsabilité dans le changement climatique et nos actions pour l’atténuer.
Les émissions nationales, ou territoriales, de la France sont estimées à 445 millions de tonnes équivalent CO2 pour l’année 2018. Mais il convient de corriger ce chiffre par le solde des émissions liées aux importations d’objets consommés mais fabriqués à l’étranger, et d’en ôter celles liées aux exportations. Cette correction est majeure pour notre pays, les émissions nettes importées (exportations déduites) représentant en effet 284 MtCO2e en 2017. L’empreinte carbone de la France – 749 MtCO2e en 2017 – est donc beaucoup plus élevée et débouche sur un diagnostic bien plus sévère pour la responsabilité climatique de la France que ses seules émissions territoriales. Ces dernières peuvent faire croire que nous sommes vertueux et que nous avons tenu les engagements pris dans le cadre du Protocole de Kyoto en 1997, qui prévoyaient une diminution de nos émissions. L’empreinte carbone, beaucoup plus sincère, indique l’inverse et montre que nous avons en réalité augmenté nos émissions totales. Ce résultat désigne d’ailleurs une action possible et très efficace pour les diminuer : relocaliser en France des productions manufacturières. En effet, comme les objets importés sont souvent fabriqués dans des pays où l’électricité est très carbonée (comme en Chine), il suffit de les fabriquer avec l’électricité française, décarbonée à près de 90 %, pour faire chuter drastiquement leur contenu en CO2. Une solution qui, en outre, aurait l’avantage de créer des emplois.
C’est le secteur des transports qui pèse le plus lourd dans nos émissions territoriales, avec 31 % du total. Les émissions du transport routier (voitures individuelles et camions) en constituent l’essentiel, avec 90 %. Il faut y ajouter les vols intérieurs, les navires… Notons que les transports collectifs, et notamment les trains, ne contribuent que très peu aux émissions alors qu’ils rendent de grands services. Ce poids du transport indique ce qui devrait être la première cible de toute politique climatique sérieuse : s’attaquer aux moteurs à carburants pétroliers pour en faire chuter drastiquement l’usage.
Les bâtiments viennent en deuxième position, avec 19 % des émissions, dont 59 % pour les logements, le reste étant lié aux bureaux et commerces. L’essentiel des émissions provient du contrôle thermique (chauffage et climatisation) lorsque ce dernier n’est pas électrique. Le gaz est en effet le premier moyen de chauffage en France et le fioul demeure utilisé, notamment en zone rurale. Il s’agit là de la deuxième cible de toute politique climatique efficace : la rénovation énergétique, afin de diminuer la consommation des bâtiments et d’encourager un usage plus répandu de l’électricité, notamment par les pompes à chaleur.
L’agriculture émet quant à elle environ 19 % des gaz à effet de serre. Toutefois, son potentiel de réduction par des actions directes est beaucoup moins élevé car une bonne part des émissions provient des systèmes digestifs des animaux d’élevage, ou des engrais. En revanche, l’agriculture peut constituer un bon moyen de stocker du carbone dans le sol par des pratiques adaptées.
L’industrie ne pèse que 18 % des émissions, et la plupart proviennent des industries lourdes (chimie, ciment, verre, métallurgie…). Ses émissions ont diminué sous le double effet de la désindustrialisation, de l’électrification et de l’amélioration des rendements énergétiques des procédés de production. Il est possible de réindustrialiser l’économie française avec un effet climatique positif grâce à une électricité décarbonée. Le secteur de l’énergie ne pèse que 10 % du total, dont la moitié pour l’électricité, due aux centrales à gaz et à charbon. Faire disparaître ces dernières permettrait de gagner un peu sur les émissions, mais si cela coûte en subventions publiques aux alternatives, il pourrait être plus pertinent et efficace de consacrer cet argent à l’isolation des bâtiments.