Pourquoi l’objectif des 1,5 °C a-t-il été inscrit dans l’Accord de Paris ?

Le texte de l’Accord de Paris précise que l’objectif climatique des pays signataires est de tenter de se rapprocher au plus près d’une hausse limitée à 1,5 °C. Cet objectif nouveau a d’ailleurs été le sujet d’un rapport spécial du GIEC publié en 2018. Ce document expose les différences d’impacts entre 2 °C et 1,5 °C d’élévation de la température, indiquant qu’ils sont significativement moindres dans le second cas. Il montre également que seules des politiques extrêmement vigoureuses de diminution des émissions mondiales de gaz à effet de serre, avec une baisse immédiate, permettraient de l’atteindre.

Ces politiques sont si drastiques – de caractère révolutionnaire dans la plupart des domaines, technologiques, économiques, sociaux, politiques et culturels, notamment par la diminution de consommation de matières premières et d’énergies qu’elles exigent immédiatement de la part des deux milliards d’êtres humains les plus riches – qu’on peut s’interroger sur la raison pour laquelle cet objectif, manifestement trop ambitieux, a été inscrit dans l’Accord de Paris. En effet, la hausse de la température planétaire est déjà de 1,2 °C depuis 1880, et même si l’on cessait immédiatement d’émettre des gaz à effet de serre, la seule inertie du système climatique conduirait à une augmentation de 1,5 °C.

La véritable raison de cette inscription dans l’Accord de Paris n’est donc pas la perspective d’y parvenir… mais celle d’y échouer. Paradoxe ? Nul mystère en réalité. Ce sont les nations les plus vulnérables au réchauffement climatique – les plus pauvres et les pays insulaires de faible altitude – qui en ont fait une condition sine qua non de leur signature. Elles n’espèrent pas vraiment que cet objectif soit atteint, mais plutôt hâter le moment où elles disposeront d’une base légale pour exiger des compensations des pays riches pour les dégâts du changement climatique chez eux. En effet, dès lors que la barre des 1,5 °C sera franchie, les pays qui en souffrent le plus, et qui sont démunis de moyens techniques et financiers pour y faire face, pourront s’appuyer sur la mention de cet objectif dans l’Accord de Paris pour en appeler à la responsabilité des pays les plus émetteurs (par habitant) et réclamer une aide. Cette dernière peut se justifier par la seule « morale » (aider les plus démunis), mais une base inscrite dans un texte signé par toutes les parties ne peut que la renforcer. Or, il est très probable que les 1,5 °C supplémentaires seront atteints puis dépassés d’ici quinze à vingt-cinq ans.

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