En 2017, selon l’AIE, les subventions soutenant la consommation des énergies fossiles, principalement destinées au pétrole et à l’électricité obtenue avec des combustibles fossiles, ont atteint environ 300 milliards de dollars. En outre, il faut y ajouter des dispositifs fiscaux exonérant de taxes certains consommateurs, ce qui fait baisser le prix de l’énergie fossile. Ces subventions et exonérations sont particulièrement importantes en Chine, Russie, Iran, Arabie Saoudite, Algérie, Indonésie, Venezuela, Inde, Mexique… Elles consistent donc à permettre l’usage massif des énergies fossiles, directement ou via l’électricité, à des populations souvent pauvres, et/ou dans des pays producteurs. Elles induisent des consommations très supérieures à ce qu’elles seraient en leur absence. Lorsque des populations pauvres sont ainsi soutenues, l’arrêt brutal des subventions peut provoquer des troubles sociaux… à l’égal de la fin des aides sur le prix des aliments de base. En octobre 2019, la hausse des prix de l’essence due à la suppression des subventions a mis l’Équateur sous tension sociale, avec manifestations monstres, blocages de routes et violences politiques. En novembre 2019, la disparition de ces mêmes subventions a servi de détonateur pour des explosions sociales en Iran, avec des manifestations réprimées dans le sang (au moins 160 morts d’après l’ONU).
Dans nombre d’États riches et non producteurs de pétrole, le mécanisme du soutien étatique aux énergies fossiles est plus subtil. Ainsi, les pays européens non producteurs font peser de lourdes taxes sur la consommation de pétrole (jusqu’à 80 % du prix de vente). Mais celles-ci peuvent faire l’objet d’exonérations ciblées pour soutenir un secteur économique (par exemple le gazole pour les marins pêcheurs) : en France, ces niches fiscales sont estimées à environ 3 milliards d’euros par an, que l’on peut considérer comme une subvention. Mais l’un des soutiens les plus importants à une activité fondée sur les carburants pétroliers est… l’absence de taxe sur le kérosène, le carburant des avions. En Europe, alors que les carburants pour les voitures voient leurs prix souvent constitués à près de 75 % par des taxes, la non-taxation du kérosène donne un avantage aux avions, redoutable pour la concurrence ferroviaire des transports moyenne distance (500 à 2 500 kilomètres).
Toutefois, il convient d’examiner l’impact des budgets publics de manière plus large. Ainsi, une portion importante des budgets publics des pays européens est destinée à des infrastructures de transport qui sont principalement utilisées par des véhicules à pétrole. Une situation qui peut changer si ces derniers deviennent massivement électriques (et si l’électricité n’est pas d’origine fossile). Mais il est intéressant de comparer cette part à celle qui est consacrée au soutien du ferroviaire décarboné lorsqu’il existe, comme en France. On se rend alors compte que le système fiscal et les dépenses budgétaires favorisent la route au détriment du rail et au grand dam du réchauffement climatique.