Oui… mais pour une part minoritaire à l’échelle mondiale, et qui dépendra des décisions futures. L’énergie nucléaire permet en effet de produire une électricité abondante avec très peu d’émissions de CO2. L’analyse complète de ses émissions (de la mine d’uranium au stockage géologique des déchets en passant par la fabrication du combustible, la construction et l’exploitation des centrales puis leur démolition) fait apparaître des performances en général meilleures que le solaire, et similaires aux meilleurs cas d’éolien ou d’hydraulique, avec une moyenne de 12 grammes de CO2 par kWh produit selon le GIEC (6 g/kWh dans le cas français selon l’Ademe). Cette performance dépend aussi, bien sûr, de la durée d’exploitation des réacteurs ; plus elle est longue et plus elle s’améliore.
Une part plus importante du nucléaire est-elle envisageable ? En février 2020, 443 réacteurs fonctionnent dans le monde – ils produisent 10 % de l’électricité – et 52 sont en construction. Mais le futur demeure incertain. Plusieurs pays affichent des programmes nucléaires très ambitieux. Comme l’Inde ou la Russie, et surtout la Chine qui va bientôt dépasser le nombre de réacteurs français et envisage d’en posséder entre 100 et 200 d’ici trente ans. De nouveaux États se lancent dans cette technologie : Émirats arabes unis, Turquie, Bangladesh, Pakistan, Égypte, Belarus, Vietnam, Pologne. Mais parmi les nations déjà dotées de réacteurs, si certaines confirment cette option (France, Royaume-Uni, Hongrie, République tchèque, Finlande…), d’autres affichent la volonté de ne plus y recourir (Allemagne, Belgique, Suisse, Espagne…). Les États-Unis sont confrontés au vieillissement de leur parc de près de 100 réacteurs, et si la politique officielle est de maintenir le nucléaire, les forces du marché et le prix du gaz local plaident contre. En outre, la recherche sur des petits réacteurs modulaires pourrait changer la donne si elle débouche sur une offre compétitive.
Cette technologie peut compter sur les ressources en uranium pour se développer avec la technologie actuelle pour un siècle. Elle possède le potentiel pour alimenter des milliards d’êtres humains en électricité avec les réacteurs dits « rapides », qui utilisent 50 fois plus efficacement l’uranium naturel que la plupart des réacteurs actuels. Mais elle se heurte à la crainte d’un accident avec une dissémination massive de radioactivité, comme la catastrophe de Fukushima Daï Ichi, au Japon, l’a rappelé en mars 2011. Et à la nécessité de trouver des solutions de long terme pour la gestion des déchets. Elle réclame aussi la mobilisation d’importants moyens financiers au démarrage, des capacités techniques et industrielles de pointe, la formation de spécialistes et des dispositifs de contrôle très sévères.
Le rapport 2014 du GIEC qui analyse les différents scénarios énergétiques compatibles avec les objectifs climatiques note que la plupart d’entre eux font appel à une part d’électricité nucléaire. Mais même dans les scénarios qui prévoient de doubler ou tripler la production nucléaire à l’horizon 2050, cette part demeure minoritaire à l’échelle mondiale, dans un contexte de forte croissance des consommations d’électricité. En revanche, elle peut être la source principale, voire majoritaire dans certains pays. Quant à l’horizon de la fin du siècle, il semble très prématuré d’en prévoir le mix électrique.