La hausse du niveau marin déclenchera-t-elle des migrations massives ?

La hausse du niveau marin d’ici 2100 sera de l’ordre de 50 centimètres à un mètre selon le rapport 2014 du GIEC, mais pourrait aller jusqu’à deux mètres selon certains spécialistes. Cet ordre de grandeur signifie qu’environ 200 à 300 millions de personnes sont menacées de voir leurs territoires disparaître sous les eaux soit de manière permanente, soit lors d’épisodes de dépression atmosphérique temporaires, souvent liés à des phénomènes violents comme les cyclones. La destruction de La Nouvelle-Orléans lors du cyclone Katrina en 2005 (1 836 décès confirmés, 80 % de la ville inondés, 100 000 personnes privées de leur maison) en est un exemple précurseur. Les régions les plus touchées sont les côtes basses, souvent des deltas fluviaux. Les zones les plus vulnérables, là où les populations sont nombreuses, sont déjà connues. Le phénomène est d’ailleurs dès à présent amorcé, comme pour le delta du Mékong au Vietnam – où d’anciennes rizières ont été converties en élevage de crevettes car l’eau douce a été remplacée par de l’eau salée.

Montée des océans, deux exemples de zone à risque
Montée des océans, deux exemples de zone à risque

Les deltas du Gange en Inde et au Bangladesh, du Nil en Égypte, du Niger au Nigeria, du Rhône en France ou du Rhin aux Pays-Bas… sont tous menacés par la montée des eaux marines. Cette menace sera modulée par d’autres facteurs. Le pompage abusif des eaux souterraines pour l’agriculture locale aggravera le problème. Ainsi que la construction de barrages en amont sur les fleuves et rivières qui diminuera la quantité de sédiments apportés à l’estuaire. À l’inverse, là où les fleuves sont exempts de barrages, l’apport sédimentaire peut contrecarrer la hausse du niveau marin, du moins en partie.

Si la perte de territoires par une submersion permanente concerne surtout des régions rurales et agricoles, les submersions temporaires lors d’épisodes météo violents menacent des grandes villes, des infrastructures portuaires, des industries situées sur les côtes. Shanghai, Shenzhen et Canton en Chine, Bangkok en Thaïlande, Tokyo et Osaka au Japon, Chittagong et Dacca au Bangladesh, Djakarta en Indonésie ou Hô-Chi-Minh-Ville au Vietnam font partie des grandes agglomérations dont une portion du territoire est menacée par de telles inondations. En Amérique, les côtes de Floride seront submergées en de nombreux endroits, autour de Miami ou dans la zone de cap Canaveral où se trouvent les pas de tir de la Nasa qui tente de les protéger par des digues artificielles. Rio de Janeiro perdra sa plage de Copacabana si la température grimpe de 3 °C, mais aussi son aéroport. En Afrique, la capitale économique du Nigeria, l’immense Lagos, est menacée. Comme Abidjan, en Côte d’Ivoire, située sur une côte dont près de 600 km² passeront sous les eaux en cas de montée d’un mètre.

Les médias et les ONG mettent souvent en avant le cas des petites îles-nations des océans Pacifique ou Indien pour illustrer le péril de la montée des eaux. Mais ces territoires, certes symboliques car leur submersion entraînerait la disparition d’un État, ne représentent qu’un petit nombre d’habitants au regard des plus de 200 millions de personnes concernées par ailleurs. Ces submersions entraîneront donc des migrations massives. À l’intérieur d’un pays, mais aussi à l’extérieur. Y faire face sans violence sera l’un des défis du changement climatique.

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