Parmi les pays industrialisés et riches, la France fait partie des plus faible émetteurs de gaz à effet de serre à taille comparable, surtout si l’on comptabilise en émissions territoriales. C’est elle qui émet le moins de gaz à effet de serre par habitant parmi les pays du G7. Mais cette performance est pour l’essentiel due à la décarbonation de son système de production d’électricité.
En 2018, les émissions directes de CO2 du secteur électrique furent en effet limitées à 20 millions de tonnes, en diminution de 50 % par rapport à 1990. Une performance due à une production décarbonée à 92,8 % en raison de sa composition. Parmi les pays industrialisés, tous ceux qui affichent des émissions de gaz à effet de serre nettement en dessous de la moyenne présentent un secteur électrique massivement décarboné, en général composé d’un mix faisant surtout appel à l’hydraulique et/ou au nucléaire (Suède, Norvège, Islande, France, Québec et Ontario au Canada…).
Mais cet atout est bien le seul. Pour le reste, l’Hexagone n’a rien d’un pays engagé efficacement dans la maîtrise de ses émissions qui ne sont, à l’exception de l’industrie, pas en ligne avec les promesses faites lors de l’Accord de Paris. Le bilan de la Stratégie nationale bas carbone dressé par le gouvernement montre d’ailleurs que ses émissions augmentent au lieu de diminuer depuis 2016.
Pour atteindre ses objectifs climatiques – la neutralité carbone (n’émettre pas plus que ce que les écosystèmes peuvent absorber) en 2050 –, la France doit donc réaliser d’importants efforts en vue d’éradiquer le pétrole des transports, exclure le gaz et le fioul du contrôle thermique des bâtiments et procéder à des rénovations thermiques permettant d’économiser l’énergie, poursuivre la baisse des émissions de l’industrie et transformer les pratiques agricoles afin d’utiliser les sols comme des puits de carbone plus efficaces.
Le Haut Conseil pour le climat, dans son premier rapport annuel (2019) a résumé ainsi son analyse de l’efficacité des politiques climatiques du gouvernement : « La plupart des mesures actuelles ne portent que sur une réduction marginale des émissions. Le gouvernement doit identifier, puis planifier les changements structurels nécessaires pour atteindre la neutralité carbone, afin de soutenir dans la durée l’emploi et l’économie française. Il s’agit d’agir sur l’urbanisme et l’aménagement du territoire, de développer et financer de nouvelles infrastructures, en particulier pour le transport, de faire évoluer les filières d’approvisionnement, les marchés, les comportements de consommation, et les pratiques agricoles. Il faut également intégrer systématiquement les connaissances sur le changement climatique, les émissions de gaz à effet de serre, et les actions bas carbone dans les systèmes d’éducation et de formation initiale et tout au long de la vie. » Pour parvenir à ces objectifs, le Haut Conseil pour le climat recommande de vérifier systématiquement si les lois et budgets, proposés par le gouvernement et votés par le Parlement, sont compatibles avec les objectifs chiffrés par la Stratégie nationale bas carbone lors de leur adoption. Un tel dispositif permettrait d’examiner l’ensemble des choix budgétaires au regard des exigences de l’action pour maîtriser les émissions.
Cette analyse, qui oppose des mesures d’effets immédiats mais marginaux aux changements structurels nécessaires, rejoint celle du groupe 3 du GIEC et montre la voie à suivre pour que la France devienne un bon élève.