Pendant une belle journée d’automne au nord de la Loire, une variation diurne de plus de 15 °C, entre les 4 °C du froid matinal et les 20 °C au début d’après-midi, font partie du « doux climat » tempéré. Il est donc très difficile de ressentir ce que signifie une baisse de température globale annuelle de 4 °C, qui correspond pourtant à la variation entre climat glaciaire et interglaciaire. De même, l’augmentation des températures annuelles du globe de 1,2 °C depuis 1880 est difficile à percevoir. En revanche, apprendre que les cinq années de 2015 à 2019 sont les plus chaudes jamais enregistrées dans l’histoire du climat impressionne davantage, même si les souvenirs personnels sont souvent limités aux situations extrêmes rencontrées.
Les extrêmes climatiques, dans une société très médiatisée, marquent les esprits. La canicule de 2003 – 20 000 morts en France – a certainement contribué à la perception du changement climatique. Mais comment ces événements ponctuels sont-ils reliés au changement climatique ? Sécheresses, inondations ou vagues de froid et de chaleur sont de forte intensité mais ce sont aussi des événements rares. Le changement climatique va-t-il modifier leur fréquence ou leur puissance ?
Pour répondre à ces questions, le recul temporel est nécessaire. Si nous avons de bons enregistrements météorologiques depuis 1950, un événement qui ne survient qu’une fois par siècle, voire moins, peut avoir échappé à une description aussi précise, même s’il reste dans les mémoires, comme les inondations de la Loire au XIXe siècle ou celle de 1910 à Paris. Aussi, les recherches se sont intensifiées sur ces événements extrêmes afin de mieux cerner leur relation avec le changement climatique.
Ces épisodes sont très divers, de la sécheresse de plusieurs mois à la crue éclair, et souvent associés à des caractéristiques climatiques régionales. Dans un climat où les températures moyennes augmentent, on s’attend à ce que les pics de chaleur soient encore plus forts. Mais vont-ils seulement suivre l’augmentation moyenne ou être amplifiées ? De même, dans un climat globalement plus chaud – et donc plus humide parce que l’atmosphère contient plus de vapeur d’eau –, comment répondra le cycle hydrologique ? Les océans tropicaux et la Méditerranée subiront-ils des évaporations plus intenses ? Cela conduira-t-il à davantage de cyclones ou d’épisodes cévenols, ou à leur intensification ? Il faut rester prudent car la réponse est différente selon le type d’événement extrême que l’on considère, et dépend souvent du changement climatique local.
Certains résultats des simulations semblent robustes, c’est-à-dire que tous ou la plupart des modèles convergent vers un même résultat. Ainsi, toutes les simulations montrent une augmentation des précipitations en Europe du Nord, où elles sont déjà abondantes aujourd’hui. On peut donc prévoir des inondations plus fréquentes. De même, tous les modèles montrent une aridification avec une baisse marquée des précipitations estivales autour du bassin méditerranéen, dans une région où l’accès à l’eau douce est déjà difficile aujourd’hui (et où la population augmente).
Concernant l’évolution des canicules en France, celle de 2003 correspond à une température de 3 °C plus élevée que la moyenne des températures du XXe siècle. Dans le pire des scénarios et pour la seconde moitié du XXIe siècle, de telles variations extrêmes pourraient atteindre 9 °C. En utilisant un modèle à fine résolution spatiale (12,5 kilomètres) développé par Météo France, pour une augmentation des températures moyennes de 3,7 °C à la fin du siècle, les températures maximales estivales dans l’est de la France pourraient faire un bond de 10 °C, tandis qu’à l’ouest, elles s’élèveraient « seulement » de 6 °C. Quoi qu’il en soit, elles seront amplifiées par rapport à l’augmentation des températures moyennes, d’autant plus que l’évapotranspiration des végétaux sera faible à cause de la plus grande aridité des sols.
Quant aux cyclones tropicaux, même si le réchauffement des surfaces océaniques augmente la vapeur d’eau dans l’atmosphère, les recherches montrent pour l’instant davantage une augmentation de leur intensité en termes de force des vents et de quantité de précipitations que de leur fréquence.