Quel rôle climatique joue la biosphère végétale ?

La vie s’est d’abord développée dans les océans et les continents sont longtemps restés exempts de toute végétation. Alors que ses premières traces remontent dans les océans à 3,7 milliards d’années, la vie n’a colonisé les continents que vers 400 millions d’années. D’abord en suivant fleuves et rivières sur les berges desquelles de petites plantes se sont faiblement enracinées. Des millions d’années ont été nécessaires pour arriver aux fougères géantes, mieux armées pour s’éloigner des rivières, et enfin aux premières forêts d’Archaeopteris, ancêtres très éloignés de nos arbres. Cette colonisation correspond à une formidable diversification de la biosphère continentale qui s’est produite en seulement quelques dizaines de millions d’années.

Durant cette période de colonisation des continents par le végétal, les données paléo-climatiques ne montrent que peu de variations climatiques. C’est paradoxal, puisque cette colonisation transforme de vastes étendues désertiques en zones végétalisées et stocke donc du carbone non seulement dans les végétaux, mais aussi dans les sols, à travers les racines et la décomposition. Alors que, pendant les premiers milliards d’années, les deux seuls réservoirs de carbone en surface sont l’océan, de loin le plus important, et l’atmosphère, plus petit mais plus prompt à s’ajuster, la végétation vient troubler ce duo. Ce nouveau joueur rebat les cartes, car le carbone qui se fixe dans la biosphère terrestre (partie aérienne, racinaire et sol), par la photosynthèse, provient en partie du réservoir atmosphérique. Les indicateurs paléo-climatiques montrent, durant cette période du Dévonien lorsque la biosphère terrestre se développe sur les continents, une baisse sévère du CO2 contenu dans l’atmosphère. Cet effondrement aurait dû conduire à un fort refroidissement. Pourtant, les températures n’évoluent pas pendant cette longue transition. Cela s’explique par un autre processus, la diminution de l’albédo, qui accompagne ce verdissement des surfaces continentales et va, lui, réchauffer la Terre. Tant que les surfaces émergées étaient restées des déserts sans vie, leur capacité à réfléchir la lumière, l’albédo, était très élevée. L’albédo des déserts actuels se situe autour de 0,4. Cette capacité à absorber plus de chaleur a contrecarré l’effet refroidissant de la baisse de CO2 et contribué au réchauffement. Ces deux processus se compensent, ce qui peut expliquer pourquoi la colonisation des continents ne provoque pas un refroidissement simultané.

Plus proches de nous, les changements de couverts végétaux contribuent aux basculements interglaciaire/glaciaire. En effet, quand le climat se refroidit, aux hautes latitudes, les forêts régressent et font place à de la végétation rase, plus adaptée à des conditions froides et arides. Or, taïga et toundra sont totalement recouvertes par la neige l’hiver et réfléchissent la lumière, beaucoup plus que les forêts dénuées de manteau neigeux. Cette augmentation de l’albédo renforce la baisse des températures et favorise la transition d’un climat chaud à un climat froid. Le couvert végétal a d’autres effets directs sur le climat. Il contrôle l’évapotranspiration, c’est-à-dire le transfert de l’eau du sol et des végétaux vers l’atmosphère sous la forme de vapeur. Il a également une action mécanique sur les vents de surface. Ainsi, une forêt exercera une résistance bien plus forte aux vents qu’une plaine nue. Enfin, la végétation contrôle une partie des flux de carbone par la photosynthèse et la respiration, ce qui influence le climat en modulant la quantité de CO2 atmosphérique et donc l’intensité de l’effet de serre du dioxyde de carbone.

Pacte pour le Climat
Newsletter Pacte pour le Climat