Comment a-t-on compris l’impact de l’homme sur le CO2 atmosphérique ?

L’origine lointaine dans l’histoire du climat de la compréhension du rôle climatique du CO2 remonte à Joseph Fourier qui, en 1824, affirme que l’atmosphère capte l’énergie de rayonnements invisibles renvoyés par la surface terrestre. Puis, dans les années 1860, le Britannique Tyndall découvre que les principaux responsables de ce phénomène sont la vapeur d’eau et le CO2. En 1896, Svante Arrhenius réalise un premier calcul sur l’effet climatique d’une augmentation de la teneur en CO2 de l’atmosphère. Mais il faut attendre 1958 pour que Charles Keeling installe la première station de mesure du CO2 à Hawaï, au sommet du Mauna Loa, et fournisse ainsi la première mesure représentative de sa concentration moyenne dans l’atmosphère. Les gaz à effet de serre sont présents à l’état de trace dans l’atmosphère et le CO2 est mesuré en parties par million ( ppm ), il faut donc développer un système instrumental avec une précision de l’ordre d’un millionième pour capturer exactement l’évolution en moyenne du CO2. La mesure de ce gaz est favorisée par son brassage dans l’atmosphère, contrairement à la vapeur d’eau dont la distribution est très hétérogène. Si l’on prend soin de s’éloigner de nos émetteurs de CO2 (usines, centrales à énergie fossiles, routes fréquentées), la valeur moyenne annuelle du CO2 est une mesure très reproductible. Grâce à un réseau de stations de mesure des gaz à effet de serre bien réparti sur le globe, et de protocoles méthodologiques permettant de comparer toutes ces mesures, des enregistrements fiables dans le temps et l’espace de l’évolution de la composition chimique de l’atmosphère sont disponibles.

Évolution de la teneur en CO2 dans l'atmosphère
Évolution de la teneur en CO2 dans l’atmosphère

Que nous disent-ils ? Ils enregistrent très bien le rythme des saisons, surtout dans l’hémisphère Nord où les continents, et donc la végétation, sont plus étendus en latitude qu’au Sud. Pendant le printemps, les processus de photosynthèse conduisant à la croissance de la végétation, provoquent une baisse du CO2, tandis qu’en automne, les facteurs dominants sont la décomposition et la respiration des plantes qui en relarguent dans l’atmosphère. Ce cycle, qui est le battement du cœur de notre planète, peut être ausculté sur un site web. Surtout, la série continue du Mauna Loa montre l’élévation de la valeur moyenne du CO2 atmosphérique de 315 ppm en 1958 à plus de 410  ppm aujourd’hui.

D’où provient cette augmentation rapide et constante ? Pour l’essentiel, de la combustion du carbone fossile du charbon, du pétrole et du gaz. Il faut y ajouter la fabrication du ciment et la déforestation, concentrée dans les régions tropicales. Il existe une preuve physique de cette origine car le CO2 atmosphérique a vu sa teneur en C14 diminuer. Or, cet isotope radioactif du carbone est très peu présent dans les réserves de carbone fossile et c’est l’injection massive de ce dernier dans l’atmosphère qui explique ce phénomène parfaitement connu et compris des physiciens nucléaires.

L’augmentation récente de la teneur en CO2 de l’atmosphère est très forte au regard de son évolution sur des centaines de milliers d’années passées. Nos émissions ont donc provoqué une sortie de route avec des valeurs inédites de la présence de CO2 dans l’atmosphère depuis plusieurs millions d’années.

Si nous poursuivons nos émissions au rythme actuel jusqu’à la fin du siècle, le CO2 pourrait grimper à plus de 800 ppm , des valeurs jamais atteintes depuis plus de 30 millions d’années. Les climats en équilibre à de telles valeurs sont profondément différents du nôtre, avec des températures bien plus élevées, une cryosphère réduite et un niveau marin nettement plus haut. Mais il s’agit de climats à l’équilibre alors que nous faisons subir à notre planète une perturbation massive et transitoire. Le bouleversement anthropique est brutal et court par rapport au temps de réponse plus long de l’océan et de la cryosphère. Cette situation inédite est simulée en utilisant différents scénarios d’émission de gaz à effet de serre à l’échelle de décennies et de siècles. C’est un des axes principaux de la recherche actuelle en climatologie.

Pacte pour le Climat
Newsletter Pacte pour le Climat